Les derniers chiffres des exportations de grumes de chêne de la France vers la Chine, publiés par French Timber en décembre 2022, confirment la progression de ces exportations qui frôlent les 600 000 m3(1), alors que les scieries de chêne, faute d’approvisionnement, tournent à 80 % de leur capacité de production, alerte Jacques Ducerf, président de la FNB. Des chiffres décevants pour les signataires de l’Accord Chêne (2) visant à limiter cette hémorragie, conviés le 6 janvier par le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau pour un point d’étape. La décision de prolonger l’Accord a toutefois été prise, en étendant et renforçant ses deux piliers essentiels, le label UE et la contractualisation (3), qui restent à court terme les seuls outils dont dispose la filière pour sécuriser l’approvisionnement de ses industries de transformation. L’Accord permet également un dialogue salué par l’amont et l’aval, et d’améliorer le label en comprenant mieux le fonctionnement des marchés. Mais contre les surenchères sans limites des acheteurs chinois, la meilleure arme ne serait-elle pas de leur opposer une demande des industriels français à la hauteur de la valorisation possible de ce bois si convoité, sans oublier les autres feuillus de nos forêts ? La filière y travaille d'ailleurs. Elle vient de réaliser un état des lieux des essences feuillues secondaires facilement mobilisables en France, première étape d’une étude pilotée par la FNB, en partenariat avec l’IGN et FCBA (4), pour identifier de nouvelles sources d’approvisionnement potentielles pour le secteur de l’emballage, et plus particulièrement de la palette.
Il faut trouver la voie médiane entre l’augmentation des prix des grumes souhaitée par les forestiers pour mettre plus de bois sur le marché et l’équilibre économique des scieries qui ne peuvent s’aligner sur les prix chinois dont les scieries sont pourtant moins modernes que les nôtres. Il est aussi temps pour les pouvoirs publics de prendre en compte les spécificités d’une filière industrielle fondée sur une matière première biologique, qui contribue de surcroît à la préservation de la biodiversité et au stockage du carbone. Un défi à la hauteur de ceux du XXIe siècle.
(1) Selon French Timber, 425 230 m3 de grumes ont été expédiés vers la Chine en 2021, soit une augmentation de 43,4 % par rapport à 2020, et en novembre 2022, on en serait déjà à 540 650 m3 (sur une récolte totale de 2,3 Mons de m3 dont 1,9 Mons de qualité sciage). Ces chiffres, fondés sur les chiffres du commerce extérieur de la Chine, seraient à confronter avec ceux des douanes françaises, mais la progression est régulière depuis 2015.
(2) L’Accord chêne a été signé le 18 février 2022 par la FNB, France Bois Forêt, l’ONF, la Fncofor, Fransylva, le CNPF, l’UCFF et les experts forestiers (EFF).
(3) Les chênes labellisés UE représentent 80 % des chênes vendus par l’ONF, un tiers de ceux vendus par les experts, tandis que les Coopératives, évaluent à près de 50 % leurs chênes vendus sous label ou sous contrat. La contractualisation à l’ONF atteindrait 34 % de tous ses bois.
(4) Avec le soutien de France bois forêt.
