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CBT : le contrôle non destructif du bois au service de son usage efficient

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Yann Benoît avec des gestionnaires de réseaux de lignes constitués de poteaux bois à Hong-Kong.

Crédit photo CBT
À l’heure de l’utilisation parcimonieuse et donc choisie de la ressource bois, le contrôle non destructif est la voie rêvée pour s’assurer d’un usage approprié du bois, aussi hors norme soit-il, et à tout moment de son cycle d’utilisation (arbre sur pied, grumes, billons, bâtiment construit). C’est la spécialité de l’entreprise Concept bois technologie (CBT), une des deux sociétés, avec Concept bois structure (CBS) créées par Jean-Luc Sandoz, docteur ingénieur bois (passé par l’Enstib), mondialement connu, qui a développé notamment le Sylvatest. L’expertise de CBT, éclose à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), est demandée tout autour du monde, pour des bois en configuration aussi bien unique que massifiée.

L’histoire des deux hommes à l’origine de CBT, Jean-Luc Sandoz et Yann Benoit, directeur technique du bureau d’études, se confond avec celle de la connaissance en contrôle non destructif pour la caractérisation des bois. Tous les deux ont largement contribué à l’émergence du savoir sur un pan de ce domaine très pointu mais débouchant sur des applications très utiles et vastes (aussi vastes que les domaines d’usages des bois tant nouveaux qu’anciens). Jean-Luc Sandoz a effectué une thèse publiée en 1984 sur la mesure physique des bois par les ultrasons, pour leur caractérisation. Yann Benoit, ingénieur Enstib, l’a rejoint en 1998 à l’EPFL, où il était professeur assistant. Il effectuera lui-même à l’EPFL une thèse publiée en 2004 intitulée « Vieillissement et fiabilité des parcs de poteaux bois dans les réseaux de lignes aériennes – Intérêt du contrôle non destructif ».

C’est avec un profil de spin-off de l’EPFL que CBT a été créée en 1998 par Jean-Luc Sandoz. Son objectif était de transférer dans le domaine pratique les travaux de recherche qu’il avait effectués au sein de l’école, avec son maître Julius Natterer, qui dirigeait alors la chaire bois de l'EPFL. Celle-ci a accompli un travail visionnaire en projetant le matériau bois dans l'approche des futurs Eurocodes qui deviendrait la norme européenne dans les années 1990. Pour CBT, la mise en application des savoirs va passer par le développement de deux appareils de mesure, le Sylvatest et Polux.

Le Sylvatest

Le Sylvatest est un appareil portable permettant grâce à deux sondes entre lesquelles sont envoyés des ultrasons de connaître la résistance mécanique du bois. En effet, le temps de propagation des ultrasons entre deux points est corrélé aux propriétés mécaniques du bois, notamment sa densité : plus le bois est dense, plus les ultrasons se propagent rapidement.

Un nœud, par exemple, favorise la déviation des ultrasons qui se trouvent ralentis. Simple… en apparence seulement ! Car une calibration nécessite d’être préalablement faite pour chaque essence, et chaque cohorte d’arbres, grumes, billons, éléments structurels de bois en service que l’on souhaite tester… Chaque type de mission de caractérisation nécessite de doter l’appareil d’un « nouveau cerveau », à savoir un modèle effectué à partir d’un échantillon des bois concernés, qu’il soit sous forme d’arbres sur pied, de grumes, de pièces sciées, d’éléments structurels dans des vieux bâtiments… « Notre profil académique nous permet d’être en contact avec les laboratoires de recherche du monde et nous offre la possibilité d’accéder à des données lorsque nous travaillons sur des bois particuliers », indique Yann Benoit. Ce peut être nécessaire s’il faut évaluer, par exemple, des bois anciens, comme lorsque CBT travailla à la Cité interdite : les informations sur le résineux du XVe siècle ne sont pas légion… CBT, avec plus de 20 ans d’expérience, est devenu expert en définition de l’échantillon représentatif et en construction du modèle, sans lesquelles le Sylvatest reste sans cerveau.

L’autre travail en R&D de la société concerne l’appareil en lui-même, son « corps ». L’entreprise en est à la quatrième génération de Sylvatest. De 3 kg, il est passé à 300 g ! Les nouvelles versions ne mesurent plus seulement le temps de propagation des ultrasons, mais aussi l’amplitude de l’onde, ce qui permet de repérer des trous, et, par exemple, de tester le lamellé-collé pour y détecter d’éventuels problèmes de collage. Désormais, un boîtier n’est plus nécessaire. La sonde sans câble et auto-alimentée est capable d’envoyer les informations à une application gérée sur smartphone.

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Utilisation du Sylvatest pour caractériser des arbres sur pied.
Crédit photo : CBT
 

Expertise pour Notre-Dame de Paris

CBT commercialise le Sylvatest auprès de professionnels, par exemple des bureaux d’études. Une grande partie de son activité liée au contrôle non destructif avec le Sylvatest est toutefois de service : expertise pour des usagers du bois, qu’ils soient maîtres d’ouvrage, charpentiers, ingénieurs de bureau d’études, experts en assurance, etc. « Nous travaillons fréquemment sur des projets qui ne sont pas standards, nécessitant une connaissance d’une ressource particulière », souligne Yann Benoit.

On ne s’étonnera pas dès lors que le bureau se soit vu confier le contrôle des pièces de chêne équarries de 20 m de long sélectionnées pour la reconstruction de Notre-Dame de Paris, qui ne sont pas d’un usage habituel à notre époque… CBT est intervenu lors de la mise en œuvre du projet AOC Bois de Chartreuse, pour suivre les caractéristiques des bois de la forêt (différentes localisations) au sciage.

Il a été missionné récemment pour le projet de doublement par recouvrement de l’autoroute Lyon Saint-Étienne (projet STENT), pour lequel la volonté du maître d’ouvrage est d’utiliser, en dehors des habitudes, des gros bois locaux, qu’il conviendra de caractériser, de la forêt à l’ouvrage. CBT a œuvré à la caractérisation des bois de peuplier pour un usage en structure porté par les Hauts-de-France. Alors que croît la volonté des maîtres d’ouvrage publics d’avoir recours à leur propre ressource locale en bois, le contrôle non destructif est un précieux outil.

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Utilisation du Sylvatest pour caractériser des grumes.
Crédit photo : CBT
 
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Utilisation du Sylvatest pour caractériser des grumes.
Crédit photo : CBT

Luxpole pour qualifier les poteaux neufs

CBT a développé par ailleurs Luxpole, qui exploite les données du Sylvatest pour l’assurance qualité des poteaux bois neufs, avant leur mise en service. L’appareil distingue trois classes de poteaux neufs : XL : poteaux aux hautes performances mécaniques, L : poteaux aux performances mécaniques élevées, S : poteaux aux performances mécaniques faibles. La fiabilité des réseaux de lignes constitués de poteaux bois peut-être assurée en purgeant les composants les plus faibles avant même leur installation sur le terrain, tandis qu’une maintenance réduite pour les plus forts est garantie.

« Avec le Sylvatest, nous mettons en œuvre une approche scientifique de la variabilité des caractéristiques des bois. Notre expérience nous permet de constater que d’une manière générale, le classement traditionnel, notamment visuel, conduit à sous-employer les bois », remarque Yann Benoit. Le contrôle non destructif permet de faire un usage le plus efficient possible des bois, ce qui devrait devenir, à une époque où la ressource se raréfie, un incontournable…

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Luxpole distingue trois classes de poteaux neufs : XL : poteaux aux hautes performances mécaniques, L : poteaux aux performances mécaniques élevées, S : poteaux aux performances mécaniques faibles.
Crédit photo : CBT
 
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Luxpole, qui exploite les données du Sylvatest pour l'assurance qualité des poteaux bois neufs, avant leur mise en service.
Crédit photo : CBT

Polux

Économiser – des risques, du temps, de l’argent, du bois… ‒, c’est ce que propose la technologie Polux ‒ qui est la deuxième grande invention de CBT au côté du Sylvatest ‒ à tous les gestionnaires de réseaux de lignes constitués de poteaux bois. La 5e génération de l’appareil vient d’être développée, qui en fait un outil de 2,5 kg (8 kg dans ses débuts) devenu pratique à transporter. L’appareil mesure la fiabilité des poteaux bois en service, grâce à une prise de mesure hyrodensitométrique qui s’effectue à la ligne de sol, l’endroit où le poteau est le plus sollicité. Deux pointes sur capteurs de force enfoncées de part et d’autre du poteau permettent de calculer sa résistance, tandis que l’humidité est mesurée par passage d’un courant électrique.

L’analyse des mesures recueillies permet de savoir si le poteau remplit sa fonction ou non ; si ce n’est pas le cas, de déterminer s’il doit être changé immédiatement ; de définir des priorités de remplacement ; de déterminer les risques associés à son changement (est-il possible de l’escalader ou non). La technologie Polux a été une révolution pour les gestionnaires de réseaux comme Enedis qui auparavant ne pouvait que taper sur les poteaux pour évaluer leur qualité, une mesure à tout le moins subjective… Lorsqu’on sait qu’Orange, avec ses 12 millions de poteaux bois (sur 15 millions) effectue 1,5 million de contrôles par an, on perçoit tout l’intérêt de rationaliser leur gestion grâce à Polux, qui est le seul outil de contrôle non destructif valide pour le contrôle des poteaux en service, explique Yann Benoit.

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Contrôle de poteau pour Orange avec Polux.
Crédit photo : CBT
 
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Contrôle de poteau pour Orange avec Polux.
Crédit photo : CBT

Des postes à pourvoir

CBT propose ses services de contrôle des poteaux et recrute des contrôleurs par régions selon les campagnes de contrôles pour lesquelles la société est missionnée. Polux est calibrée pour toutes les essences résineuses employées pour les poteaux en Europe (pin, sapin, épicéa, mélèze…), , de même que pour des essences tropicales ou d’autres pays. Car si le marché est de niche, l’activité est mondiale pour CBT, qui se voit confier le contrôle de poteaux en bois non seulement en Europe (France, Suisse, Allemagne, Autriche, Norvège, Lettonie…), mais aussi au Canada, aux USA, au Brésil, en Afrique du Sud, en Australie, aux Émirats arabes unis, en Turquie, en Uruguay, aux Îles Fidji…

Avec le Sylvatest et Polux, CBT permet un usage efficient de la ressource bois, ce qui est aujourd’hui vital.

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Utilisation de Polux au Brésil.
Crédit photo : CBT
 
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Utilisation de Polux en Turquie.
Crédit photo : CBT

Exploitation forestière

Magazine n°1142

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