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Paris / Colloque du CIBE : le bois-énergie à l’horizon 2030

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Le Comité interprofessionnel du bois-énergie (CIBE) organisait son colloque annuel à Paris le 10 novembre dernier. Le CIBE fêtait cette année ses dix ans d’existence et profitait de cet anniversaire pour faire un retour sur ces dix années et une projection pour l’avenir à l’horizon 2020-2030.

Dix ans d’existence pour le CIBE, mais plus de 40 ans de militantisme pour les convaincus de la première heure… C’est la création du Fonds chaleur qui a permis un vrai décollage de cette filière qui compte aujourd’hui près de 1.000 chaufferies de plus de 1 MW et environ 2.000 petites chaufferies (< 1 MW). Après une période de multiplication des projets, l’heure est aujourd’hui à une approche plus qualitative passant par la maîtrise de l’approvisionnement et à des technologies avancées permettant une valorisation optimisée de la ressource.

Tributaire du cours du pétrole et des politiques publiques

En faisant un retour sur l’histoire du bois-énergie depuis les années 70, Serge Defaye, qui fut l’un des pionniers de la promotion de cette énergie, relie directement son développement à deux facteurs que la filière ne maîtrise pas : «Le cours du baril du pétrole, qui détermine le prix des énergies fossiles et rend plus ou moins attractif le bois-énergie pour les consommateurs, et les politiques publiques d’aides qui ne s’inscrivent pas toujours, hélas, dans la continuité». Depuis la seconde moitié de 2014, la baisse du cours du baril (en dessous de 50 dollars) et la dérégulation du prix du gaz ont ainsi affecté la viabilité des projets d’autant plus que «les coûts d’investissement ont tendance à croître (mise aux normes des traitements des fumées) et que les coûts d’exploitation/maintenance avaient parfois été sous-évalués. De même, il faut prendre en compte une nécessaire réévaluation du prix des combustibles bois puisque les marchés de niche et de proximité ne sont plus adaptés à des projets qui changent d’échelle», analyse-t-il.
Face à ces aspects défavorables, les décideurs continuent à monter des projets grâce aux subventions à la hausse car «on peut désormais cumuler Fonds chaleur, aides régionales et Fonds structurels européens, à des taux d’intérêt très bas qui favorisent l’investissement, et à la taxe climat-énergie qui va aller en augmentant», rappelle-t-il.
Il n’en reste pas moins selon lui que «pour passer à la vitesse supérieure, un important chemin reste à parcourir : améliorer la structure de l’approvisionnement ; aller vers plus d’excellence technologique, énergétique et environnementale ; et simplifier les procédures de montage juridique et financier trop complexes, trop longues et trop coûteuses.»
Le colloque passait donc en revue les différents facteurs de la compétitivité de la production de chaleur bois, d’une part la quantité, la qualité et le coût de l’approvisionnement, d’autre part les performances techniques et environnementales des installations.
Rémy Grovel, secrétaire de la commission "Approvisionnement et combustibles» du CIBE de 2008 à 2012, constate une évolution quantitative et qualitative de la demande en combustible bois : «Actuellement les plaquettes de scierie représentent encore 35% des combustibles BE mais moins de 5% des «appros» des grandes centrales, les écorces 7% du BE mais de 1 à 3% des «appros» des centrales, les broyat bois d’emballage 5 à 15% des «appros» des grandes centrales et les plaquettes forestières ont augmenté de 30% à plus de 50% des «appros «entre 2012 et 2015».
«Parallèlement les prix de ces différents combustibles se resserrent, et convergent vers 40 et 55 €/tonne. Les prix au MWh sont par contre plus variables…»
Et de nouveaux produits apparaissent dont les qualités sont plus hétérogènes : refus de crible/compostage, déchets verts (issus de déchetterie), bois et déchets d’élagage urbain et bord de linéaire et bocage, broyat de souches (Aquitaine,…), mais aussi les agropellets (composés d’un mélange bois-biomasse agricole), sans compter les mélanges…
Les opérateurs des installations de forte puissance sont à la recherche de produits diversifiés, mais constants dans leurs caractéristiques, pour sécuriser leur approvisionnement, au meilleur prix au MWh tout en cherchant à limiter les coûts d’exploitation et d’entretien.

Des ressources de plus en plus diversifiées

Face à ces enjeux, quel est l’état de la ressource disponible ? Ludovic Guinard, de FCBA, précise qu’ «il faut bien distinguer la ressource théorique, la disponibilité brute, la disponibilité technico-économique et ce [qu’il] appelle la disponibilité supplémentaire». «Les études sur la ressource forestière disponible montrent une récolte potentielle à l’horizon 2030 de 80 millions de m3 annuels de BOBIBE, dont environ 35 millions de m3 de bois d'œuvre.»
Pour Rémi Chabrillat (Ademe), l’objectif prioritaire est donc "de récolter 70% de la production, ce qui est envisageable mais pas facile. Le premier levier d’augmentation de la ressource serait le développement du bois matériau, notamment feuillu», estime-t-il.
Des espoirs d’amélioration sont portés par l’Appel à manifestation d’intérêt Dynamic bois du ministère de l’environnement, rappelle Rémi Chabrillat, «les 24 projets retenus en 2015 devraient permettre de récolter 4 millions de m3 supplémentaires».
L’importance de la ressource déchets de bois est donc devenue un enjeu majeur, ils représentent entre 10 à 15% de l’approvisionnement des installations bois-énergie, soit 1,2 million de tonnes. Pour Ludovic Guinard, se référant à une étude récente de FCBA sur ce sujet : «Leur part pourrait augmenter par une meilleure gestion du gisement de déchets de bois, 7, 2 millions de tonnes au total en France dont 1 million autoconsommé. On pourrait y ajouter 1,2 million de tonnes enfouies actuellement par le secteur du bâtiment et les particuliers/collectivités et 1 million de tonnes exportés vers les industries du panneau européennes». «La sortie du statut de déchets représente une ressource supplémentaire potentielle qui actuellement est compensée par l’effet conjugué d’un meilleur taux de recyclage et la baisse de l’activité économique pourvoyeuse de ces déchets.»

Efficacité des installations

Le développement du bois-énergie passe aussi par l’amélioration des installations pour les utilisateurs, conseille Jean-Pierre Tachet, conseiller technique au CIBE. «Il faut répondre à leurs attentes : souplesse d’utilisation, adéquation combustible/chaudière, sécurité d’exploitation et efficacité énergétique. A cela s’ajoutent les exigences environnementales comme les émissions d’effluents gazeux (nouvelle réglementation en 2013) et les émissions de poussière.»
Au-delà de l’amélioration des performances des installations, qui vont évoluer avec les progrès des nouvelles technologies, il est important de veiller aussi au bon dimensionnement des projets, car «le surdimensionnement des chaudières dépasse souvent les 50%» signale Kalice, bureau d’études et d’AMO spécialisé en chaufferies bois. Quant à la qualité des combustibles, elle passe aussi par une maîtrise de leur PCI, et de sa stabilité. Au terme de ces dix années, le bois-énergie entre donc dans une deuxième phase où la recherche de son équilibre économique passe par la stabilité de son approvisionnement mais aussi par une meilleure qualité des combustibles et des installations.

Nathalie Jaupart-Chourrout

Bois-Energie

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