Etudiante en marketing international, Géraldine Kerdilès ne se prédestinait pas à travailler dans le bâtiment ; l’histoire en a décidé autrement suite à un concours de circonstances. A la tête d’une entreprise finistérienne de 25 salariés construisant 50 maisons à ossature bois par an, elle a relevé tous les défis haut la main grâce à son dynamisme et à sa volonté d’aller de l’avant.
Etant la fille du patron, une femme dans le bâtiment et novice en matière de construction en bois, elle aurait pu baisser les bras. Au contraire, puisant sa force dans ce qui la caractérise, elle a su s’imposer. «Dans mon cas, il a fallu faire ses preuves. J’ai eu la chance de travailler avec une équipe de jeunes enclins à m’apprendre le métier. Mon père m’a transmis son savoir-faire et m’a laissé prendre des décisions en me faisant confiance. Enfin, je me suis immergée dans le secteur d’activités en réalisant une étude de marché de la maison bois et en apprenant la technique sur chantier. Mon œil neuf m’a notamment permis d’apporter de nouvelles idées», déclare la jeune dirigeante.
Un chiffre d’affaires multiplié par 2 en 5 ans
Ce goût du challenge semble être dans les gènes de sa famille. Son père Alain Kerdilès crée l’entreprise Akabois en 2004. Dirigeant d’une entreprise de gros œuvre et de construction de maisons individuelles depuis 1973, un voyage au Canada lui fait changer son fusil d’épaule. Il se lance dans la construction bois. En 2010, suite à des ennuis de santé et au désistement de son repreneur, sa fille lui vient en aide pendant 6 mois. La passion du métier fait qu’elle est toujours là aujourd’hui. Elle a apporté sa pierre à l’édifice en développant l’entreprise avec un chiffre d’affaires qui a évolué de 1,8 million d’euros en 2010 à 4 millions d’euros en 2015, soit une augmentation de 122% depuis son arrivée. Pour ce faire, elle a développé la gamme de maisons conçues par l’entreprise qui se décline ainsi en trois types : la gamme Akabois, cœur de métier de l’entreprise qui réalise des maisons bois sur-mesure (clé en main ou hors d’eau/hors d’air), Passivbois dédiée aux maisons passives et Ekobois commercialisant des maisons sur plan-type. Pour l’avenir, Géraldine Kerdilès mise sur la gamme Passivbois, les maisons bois passives. «Notre clientèle, en attente d’un bâti performant, nous a progressivement amenés vers les maisons passives, innovantes et peu énergivores. C’est tout à fait dans la continuité de l’esprit de l’entreprise», témoigne-t-elle.
Pour maîtriser le sujet, toute l’équipe du bureau de l’entreprise – commerciaux, dessinateurs-métreurs, dessinateurs-projeteurs, conducteur de travaux et Géraldine Kerdilès – a bénéficié d’une formation de trois jours, en avril 2014, par le président de la Fédération française de la construction passive. «Enclin au management participatif, j’ai voulu associer l’équipe bureau à la prise de décision. Ces trois jours nous ont convaincu de partir sur cette voie. La construction passive est le must en construction. Elle répond à des exigences de qualité irréprochable».
La gamme de maisons à ossature bois s’étoffe
Pour aller plus loin, la dirigeante décide de concevoir une maison passive témoin d’architecture cubique à deux pas de l’entreprise. Aménagée et proposée à la location, elle officie comme une véritable vitrine du savoir-faire de l’entreprise. Lors de sa visite, force est de constater le confort qu’elle procure grâce à ses murs perspirants dotés de 260 mm d’isolant dont une isolation par l’extérieur de 60 mm en fibre de bois, ses menuiseries en triple vitrage et l’isolation de la toiture avec de la ouate de cellulose. Des murs perspirants aux mêmes caractéristiques se retrouvent dans la conception des maisons sur-mesure. «La maison passive présente une étanchéité à l’air quatre fois supérieure à celle répondant à la RT 2012. Elle bénéficie d’une VMC double flux, d’un ballon d’eau chaude solaire, de brise-soleil couplés avec le thermostat. La domotique permet de réguler les brise-soleil, la température intérieure, le niveau de CO2, le taux d’humidité et informe sur la consommation en temps réel des équipements», précise Géraldine Kerdilès.
Constatant que les maisons sur-mesure et passives ne répondent aux attentes que d’une seule partie du marché, elle réfléchit en 2011 à la construction de maisons sur plan-type afin de cibler les primo-accédants. Le résultat est probant. Pour preuve, l’augmentation du chiffre d’affaires de 30% en 2011 et encore de 30% en 2012. «Une étude de marché menée à mon arrivée m’a permis de constater que les primo-accédants représentaient 50% du marché en 2011. Les maisons construites à partir de plans types nous permettent d’optimiser les coûts de fabrication et de bureau d’études. Cela se répercute sur le prix de vente qui correspond plus à leur budget. Ces maisons représentent un investissement de 1.100 euros/m2 comparativement aux maisons sur-mesure RT 2012 à 1.400 euros/m2 et aux maisons passives à 1.600 euros/m2».
Des matériaux locaux et naturels
Le tournant pris par l’entreprise a imposé la refonte de l’atelier de fabrication et la réalisation d’investissements pour un montant de 800.000 euros HT sur trois ans (cf. encadré). Le nombre de salariés a triplé depuis son arrivée. L’équipe de vente intègre aujourd’hui un responsable commercial et trois commerciaux sur toute la Bretagne. Au sein du bureau d’études, trois personnes travaillent sur les avant-projets en réalisant les plans, les métrés et les devis et trois autres réalisent les plans d’exécution. Sept menuisiers interviennent au sein de l’atelier et quatre charpentiers s’occupent du montage et des charpentes des maisons sur chantier. Enfin, deux conducteurs de travaux assurent le suivi des chantiers. A cela s’ajoute une secrétaire et Géraldine Kerdilès. A noter la faible moyenne d’âge des salariés de l’entreprise : 28 ans. «Une volonté de la direction d’embaucher des jeunes avant tout», souligne Géraldine Kerdilès.
Le douglas se retrouve très fréquemment dans la fabrication du bardage. Il est également utilisé pour la fabrication de l’ossature, de même que le sapin du Nord traité. «Nous souhaitons promouvoir le douglas, car c’est une essence locale, en provenance de scieries bretonnes, et naturelle de classe III. Nous voulons mettre en avant le savoir-faire de notre territoire. De plus, notre clientèle est très sensible à l’utilisation de matériaux locaux et naturels. Leur approche est très technique. De notre côté, en utilisant des matériaux naturels et locaux pour nos maisons, nous sommes en cohérence avec notre perception de la construction», appuie Géraldine Kerdilès.
La maison passive prend de l’ampleur
A l’analyse des carnets de commandes, l’ossature bois attire tout autant les jeunes couples que les jeunes retraités en recherche de bien-être. Le développement de la gamme contribue très nettement à l’élargissement de la clientèle et par voie de conséquence à une progression du chiffre d’affaires. Depuis le mois de juin 2015, cinq maisons passives sont sorties de l’atelier d’Akabois. Cette année 2016, le carnet de commandes inclut une cinquantaine de maisons dont vingt en sur-mesure RT 2012, vingt en approche passive et dix sur plan-type. L’entreprise mise fortement sur les maisons passives. «Nous souhaitons nous orienter progressivement vers les maisons passives. Nous fabriquons de plus en plus de murs perspirants. A terme, nous voulons que le sur-mesure devienne du passif de base». Akabois profite d’un marché de l’ossature bois en hausse depuis cinq ans. L’outil de production dont dispose l’entreprise lui permet d’être compétitive sur le marché. La dynamique de groupe fait également partie de la recette de la réussite. «Il est important de créer une synergie au sein de l’équipe. J’organise régulièrement des réunions transversales d’échanges au sein de l’entreprise pour impliquer les salariés dans la stratégie de développement d’Akabois», insiste Géraldine Kerdilès. Labellisée Maisons de qualité depuis 2014, Akabois bénéficie d’un taux de recommandation de la part de ses clients de 90%, preuve de leur satisfaction. Tous les ingrédients sont ainsi réunis pour garantir la pérennité de l’entreprise.
Cécile Giamberini
