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Bourgogne / Brugère/Ensam : un labo de recherche pour le placage de hêtre

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Marraine de la dernière promotion bois de l’Ensam de Cluny, la société Brugère va travailler pendant trois ans avec le labo de recherche de l’école des Arts et Métiers pour améliorer sa productivité et développer de nouveaux produits. Ce partenariat a été baptisé Bopli, comme Bourgogne placage innovation.

Spécialisée dans le déroulage du hêtre, la société Brugère accueillait début janvier en haute Côte-d’Or la 31e promotion bois de l’Ensam de Cluny. Une visite à double sens : non seulement Brugère est le parrain de cette promo de douze élèves, mais l’entreprise se trouve liée pour trois ans à la célèbre école des Arts et Métiers par le biais d’un laboratoire mixte de recherche public-privé. L’industriel bourguignon va bénéficier de l’expertise du LaBoMaP (1) pour faire avancer sa recherche et développement, améliorer sa production et inventer de nouvelles applications.
Ce 13 janvier, André Vacheyrout, le directeur général, a accueilli les futurs ingénieurs avec un large sourire. Il faut dire que l’horizon s’est largement éclairci ces dernières années pour le leader européen du déroulage de hêtre. Victime d’une très mauvaise conjoncture pendant la crise, Brugère a été contraint de déposer son bilan en 2012 pour mieux redresser la barre. Aujourd’hui, les résultats sont là. Avec un chiffre d’affaires de 8,5 millions d’euros, le dérouleur a retrouvé une activité pérenne et il négocie son placage aux quatre coins du monde. Les feuilles de hêtre produites en Côte-d’Or servent essentiellement à fabriquer du contreplaqué moulé pour l’industrie du meuble. Comme ces chaises et banquettes que l’on retrouve par exemple sur les terrasses des restaurants McDo d’Europe. Brugère vend ses placages aux spécialistes du moulage que sont Régnier dans l’Aube et Cardineau en Vendée. En revanche, le Bourguignon assemble lui-même à Châtillon-sur-Seine du contreplaqué plat de hêtre, des panneaux méconnus en France mais très utilisés en Allemagne pour l’agencement.

Bénéfices en amont et en aval

Après la visite guidée des deux chaînes de déroulage et de l’atelier de fabrication de ce contreplaqué, André Vacheyrout a souligné l’importance du partenariat de recherche qui lie désormais Brugère et l’Ensam. Ce laboratoire largement financé par la région Bourgogne est baptisé Bourgogne placage innovation (Bopli). Il est «donnant-donnant» dans le sens où la PME bénéficie de moyens de R&D qu’elle serait incapable de financer seule ; en contrepartie les chercheurs de l’Ensam profitent d’un outil et d’une expertise industrielle pour mener des travaux fondamentaux sur le déroulage. Le LaBoMaP et Arts, la société de valorisation liée à l’Ensam, entendent ainsi étudier l’effet de l’état initial des bois dans le processus de fabrication de placages déroulés.
L’industriel, lui, attend des bénéfices en amont et en aval. En amont, il souhaite établir un lien entre la qualité des placages et l’origine des bois afin d’utiliser cette connaissance pour mieux régler son outil, depuis l’étuvage jusqu’au déroulage. «Nos approvisionnements sont divers», observe André Vacheyrout, «la forêt des Vosges à plus de 600 mètres, la forêt de Châtillon à 400 m et la forêt de plaine de Normandie donnent des produits différents. Nous devons nous adapter à la ressource, travailler sur la traçabilité, le rendement matière et les imperfections que nous rencontrons lors du déroulage. Du hêtre vosgien qui a poussé dans telles conditions et qui suscite tels défauts lors du process, comment pouvons-nous corriger cela ? Devons-nous intervenir lors de l’étuvage ou affiner les réglages au stade du déroulage ?» Des questions essentielles pour améliorer la productivité de l’entreprise et son rendement matière. Les liens mis en évidence entre la sylviculture, l’origine géographique et les propriétés des produits seront partagés avec les acteurs de la filière.
Enseignant chercheur au LaBoMaP, Louis Denaud connaît bien les problématiques du déroulage, l’une de ses spécialités à Cluny. «Aujourd’hui, pour obtenir des paquets homogènes, Brugère est obligé de mixer de nombreuses provenances. Les gens expérimentés pensent qu’il existe un vrai lien entre le scénario sylvicole et la qualité finale du produit. Lier la qualité du placage avec l’historique de la grume, améliorer la traçabilité permettra d’obtenir une production plus homogène», observe le chercheur.

Associer des produits composites

Un important travail sera également mené en aval. Bopli a vocation à inventer de nouvelles applications pour la production Brugère. «Nous devrons avant tout caractériser le contreplaqué de hêtre qui est très peu utilisé en France, car méconnu», souligne André Vacheyrout. «Le contreplaqué est le premier produit composite au monde, nous devons continuer dans cette voie, associer le hêtre à d’autres matériaux comme la fibre de carbone, ou d’autres essences de bois». Pourquoi aussi ne pas imaginer un contreplaqué innovant à base de hêtre thermochauffé afin d’utiliser les qualités techniques et esthétique du traitement thermique ? Dans ce processus d’innovation, Louis Denaud repère deux étapes fondamentales : l’identification des verrous techniques et scientifiques et la résolution des problèmes par un travail commun. Bopli va coûter 1.245.000 euros, susciter un poste d’ingénieur chez Brugère, un contrat d’étude post doctoral et des contrats d’études ingénieur à l’Ensam. André Vacheyrout souligne l’effort «financier et structurant» consenti par l’ex-région Bourgogne et voit dans ce partenariat inespéré une chance formidable de développer l’entreprise.

De notre correspondant
Pascal Charoy

(1) Laboratoire bourguignon des matériaux et procédés.

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